• Services communs
  • Died Maroze
  • L'Ermitage
  • Inspecteur Javel
  • Les lits russes
  • Manifestations
  • Metiel
  • Mireille Mathieux
  • Neva
  • La Parpaillote
  • Le pont
  • Premier mai
  • Smolny
  • La tricentenaire
  • Valodia
  • Poutinka
  • Voltaire
  • Des parpaillots russes
    Lors de la révocation de l’Edit de Nantes, la famille Brulleau vivait quelque part au sud de la France, là où les « catholiques romains » vivaient en harmonie avec les autres chrétiens, les protégeant même au besoin. Les Brulleau, vous l’aurez compris, étaient membres de l’église réformée de France appelés également « protestants » que l’on qualifiait parfois du terme injurieux de « parpaillots » (du provençal « parpaioun »).

    Estimant que la religion protestante était pratiquement éradiquée, Louis XIV avait décrété à Fontainebleau en 1685 qu’il n’y avait donc plus lieu de maintenir l’Edit de Nantes que le bon roi Henri IVe du nom, avait fait promulguer pour mettre fin aux guerres de religions. A force de violences, « dragonnades », envois aux galères et conversions forcées – une Saint-Barthélemy permanente à petit feu – il ne devait logiquement plus rien rester de visible sur le sol français de cette « plante nuisible » qu’avait semé Calvin. C’était sans compter de la résistance de quelques uns. Le vent de l’histoire les transporta jusqu’en Allemagne et ensuite en Russie. En cette terre lointaine de leurs racines originelles, les Brulleau firent souche et leur nom se russifia en « Brulloff ». C’est de cette famille qu’est issu le grand peintre du XIXe siècle, Karl Brulloff dont les œuvres sont présentes dans la plupart des grands musées du monde.

    La malchance a souvent poursuivi certains de ces protestants car, après 1917, les descendants de Karl Brulloff furent obligés de quitter la Russie pour venir se réfugier ….en France. Un aller et retour en somme.

    L’un de ses lecteurs habituels - peut-être un irréductible calviniste retranché au cœur d’une forêt normande, adresse chaque semaine, depuis des mois une photocopie de ma chronique hebdomadaire à la dernière descendante de la famille, une « parpaillote russe », arrière petite-nièce de Karl Bruloff, qui vit aujourd’hui à Paris. Lors de mon récent séjour en France, j’ai eu le plaisir de rencontrer cette dame. A cause de Louis XIV « l’intolérant », mais aussi à cause de Lénine, nous avons fait connaissance et longuement discuté. Décidément, le Roi Soleil n’était en fait qu’un petit roi !

    Saint-Pétersbourg le 15/09/2002