Après des mois de recherches, au printemps 2007, j'ai enfin vu aboutir mes efforts. Dans cette Maison des officiers, à quelques encablures de la base militaire, Jeanne est là, devant moi, non pas en chair et en os mais en bronze, fièrement hissée dans ses étriers sur un fringant destrier, tenant dans sa main droite la hampe d'un drapeau.
Dire que nous avons été accueillis à bras ouverts serait mentir mais, l'effet de surprise aidant, un siège nous est cependant offert et je suis autorisé à prendre des photos de la statue de Jeanne d'Arc. La secrétaire qui accompagne le Contre-Amiral semble beaucoup plus réservée à notre égard. Le bronze, imposant, semble être à l'échelle 2/3. Sur le socle, en gros caractères, la signature d'Emmanuel Frémiet - justement célèbre par ses statues équestres de Jeanne d'Arc.
C'est à ce moment que tout s'est gâté, quand la secrétaire affirma que la statue ici présente n'était pas celle de Jeanne d'Arc. Preuve à l'appui, elle exhiba une page extraite d'un volumineux dossier d'archives où était écrit «statue offerte par l'Estonie à la Russie en 1909». Toute discussion devenait alors impossible. Faut-il qu'ils aient tellement aimé la Russie impériale les Estoniens de cette époque....
Retour à la case départ: sauf que je possède dorénavant mes propres photos. En juin 2008, me rendant une nouvelle fois à Kronstadt, j'avais tenté, sans succès, d'entrer dans la Maison des officiers. Un jour, on admettra que c'est bien la statue de Jeanne d'Arc qui, depuis près d'un siècle, est retenue prisonnière à Kronstadt sous une fausse identité. Rien que d'y penser, j'en suis tout feu tout flamme.
le 8 décembre 2008